Les LGBT sur France-Inter cet été : "Je t'aime Pareil"

Cet été, chaque Samedi en soirée, France-Inter donne la parole aux lesbiennes et aux homos de France et d'autres parties du monde.

Trois émissions ont déjà été diffusées. Voici l'adresse qui vous permet d'écouter la première :

http://www.mougin.org/iphone/851aad63f2df4487f6cfebe55e4c4360a024395a/mp3/Jet_aimepareil_11375-26.06.2010-ITEMA_20233238-0.mp3

Et pour ceux qui préfèreraient un compte-rendu écrit, le voici aussi, par votre serviteur :

Oui, cliquez sur ce lien de podcast : l’enregistrement est parfait, et l’émission, malgré des maladresses, mérite d’être écoutée. Car lorsqu’on nous donne la parole, il faut non seulement la prendre, mais aussi l’écouter ! Écouter notre propre voix.

L’émission commence par un florilège navrant de préjugés homophobes, une anthologie de la stupidité prétentieuse et haineuse de l’hétérosexualité normative et dogmatique (ce que l’un des participants appelle « la société hétéronormée »).

En retour, devant toutes ces insultes, ce sentiment de l’exclusion, de la différence radicale, effrayante. L’étiquette « malade » qui nous est collée, et que certain(e)s finissent même par reprendre à leur compte.

Le besoin de retrouver la prétendue « normalité » du « monde hétéronormé » et, en conséquence, la fréquente erreur du mariage hétérosexuel qui, en général n’arrange rien ni personne.

Puis les vraies questions : Qui/que suis-je ? Et comment l’être ? Comment être moi ? M’accepter ?

Et, pour cela, « faire taire le critique homophobe qui est en soi ». Car « la pression de la norme sociale est tellement forte que même les homosexuels en sont imprégnés. »

Jeter le masque qui finit par ne plus rien protéger : l’hyper délicate question du coming out…

N’oublions pas que l’émission et les interventions ont lieu dans le contexte… français.

Puis on passe à la présentation du MAG, Mouvement d’Affirmation Gay, dont la première raison d’être est que les homosexuels, les jeunes surtout, ne se retrouvent pas isolés dans la différence et l’exclusion, tout en évitant de tomber dans le piège du communautarisme et de la ghettoïsation.
[Association le Mag :
Mouvement d’Affirmation des jeunes Gais, Lesbiennes, Bi et Trans, une association de jeunes âgés de 15 à 26 ans qui a pour vocation d’aider d’autres jeunes, homosexuels, bisexuels, trans ou en questionnement, à s’accepter et s’assumer, de lutter contre l’homophobie et le sexisme.
http://www.mag-paris.fr/]

Enfin, chaque semaine, Je t’aime pareil donne la parole à des gays de l’étranger. Cette semaine, le Cameroun, où il sera, évidemment et malheureusement, question :
• d’homophobie d’état
• du rôle exorbitant des croyances religieuses, avec l’évocation du discours ignoble de l’archevêque de Yaoundé en décembre 2005, dans lequel il attribuait la crise de la famille et de la société camerounaises à l’homosexualité, d’où il s’ensuivit pogroms et lynchages médiatiques, suivis de procès iniques…

Deo gratias !

http://www.mougin.org/iphone/851aad63f2df4487f6cfebe55e4c4360a024395a/mp3/Jet_aimepareil_11375-10.07.2010-ITEMA_20234900-0.mp3

Pour ceux qui souhaiteraient appeler pour participer ou bien témoigner voilà le numéro : 0033 1 45 24 70 00


En voici un petit résumé, pour vous donner envie de l’écouter, et de cliquer sur le lien du podcast (29 minutes). Franchement, cette semaine encore, elle vaut la peine : ne serait-ce que pour nous donner une idée de la distance qui sépare les aires culturelles marocaine et française, mais aussi nous donner… quelques idées !

Aujourd’hui, l’émission présente le témoignage d’une maman qui a « accueilli » (le mot est beau) deux coming out : celui de son fils et… de sa fille ! qui lui ont annoncé leur homosexualité. Elle insiste sur le mot « annoncer » :

« On n’avoue pas son homosexualité, on n’a pas commis une faute ».

Elle parle ensuite des premières réactions à cette annonce : d’abord la surprise. Puis… la peur du sida.

Depuis, cette maman participe à l’association « Contacts », qui réunit parents et homos pour favoriser la compréhension mutuelle, et aider les uns et les autres, par l’échange et le dialogue, à parvenir à une acceptation.

Elle parle aussi d’une autre réaction : les larmes. « C’est pas ce qu’on avait pensé ». « Et les petits-enfants ? »
« Mais à la fin on se rend compte que les larmes, c’est ridicule. »

Dans ce dialogue, destiné à évacuer le non-dit et les préjugés et les clichés, le fils propose très intelligemment à sa mère qu’elle lui pose toutes les questions qu’elle veut. Seul moyen en effet d’évacuer à la fois les préjugés et la peur !

Mais cette maman, décidément intelligente et sensible précise : « Je ne me suis jamais permise de poser la question que posent certains parents : “Qui fait l’homme, qui fait la femme” ? » Question évidemment idiote car, le plus souvent sans objet. Comme le dit avec humour l’un des présents sur le plateau : « Tant mieux, parce que c’est ou deux hommes ou deux femmes ! ».

À sa fille, qui annonce à ses parents être lesbienne, à l’âge de 14 ans, elle répond : « Je le sais depuis avant que tu le saches toi-même ! »

Nous joignons ensuite par téléphone Stéphane, qui a appris l’homosexualité de son père à l’âge de 13 ans en le voyant embrasser un de ses amis sur la bouche !

Les questions que lui se pose sont celles-ci : « Suis-je une erreur ? Devrais-je être là ? Vais-je, moi aussi, être homosexuel ? »

Mais ce qui permet à Stéphane de surmonter cette révélation, c’est une très bonne communication avec le père. La relation n’a pas changé, s’est plutôt renforcée. « J’aimais passer du temps avec mon père. »
La mère s’est sentie bernée. Mais elle et son mari se sont toujours entendus.

3ème partie de l’émission, un document : le premier coming out médiatisé en France, celui de l’essayiste Guy Hocquenghem, dans Le Nouvel Observateur, le 10 janvier 1972.

C’est l’occasion de savourer les réactions que ce coming out déclencha à l’époque, et qui sont des manifestations de la stupidité de l’hétérosexualité normative : « L’étreinte de deux hommes est la chose la plus répugnante du monde. Les hommes, les vrais, ne sont attirés que par la féminité. »

Des propos qu’on entend peu aujourd’hui à l’association Contacts. Les questions que (se) posent plutôt les parents à l’occasion du coming out de leur enfant sont plutôt du type culpabilisation : « Qu’est-ce que j’ai bien pu faire ? Qu’est-ce que j’ai pu rater dans son éducation ? »

Retour à Contacts et à son fonctionnement : l’association a été fondée en 1993 par un ancien du MAG (voir émission précédente). Les réunions à Contacts sont ouvertes, et créent des échanges entre parent et enfants. Les uns et les autres se rendent compte qu’ils ne sont pas seuls au monde.

Il faut à tous du temps pour accepter que leurs enfants sont homosexuels.

D’autres types de réunions mettent ensemble d’une part les parents, d’autre part les enfants, et sont animées par des psychologues.

Les enfants s’aperçoivent aussi que, ayant mis des années pour s’accepter en tant qu’homos, ils ne peuvent pas demander non plus à leurs parents une acceptation immédiate !

Très belle conclusion : l’amour reste ce qui est le plus important.

Un dernier message de cette maman d’homosexuels : l’homosexualité, ça n’est pas dans les gènes, ça ne se transmet pas de père à fils !

Le format de l’émission prévoit chaque semaine un témoignage en provenance d'un pays étranger. Cette semaine coup de fil à Monica, franco-colombienne, qui a vécu la plus grande partie de sa vie en Colombie.

Monica nous apprend que la Colombie « a toujours été gay-friendly d’une façon ou d’une autre ». C’est un pays où plus le niveau culturel est haut, et plus l’acceptation est grande (ce qui est un phénomène universel). Beaucoup d’artistes homosexuels en Colombie, acteurs, metteurs en scène : c’est par là que passe le message (la visibilité, l’image positive). « Il sont les porte-parole de cette identité », qui est dès lors vécue comme une situation normale.

Autre précision importante : le pays est en progrès sur la question du mariage et de l’adoption.

Terminons ce compte-rendu avec l’information bibliographique de cette semaine :

Marina CASTAÑEDA, Comprendre l’Homosexualité, Éditions Pocket Évolution : un livre généraliste et très complet.

3e émission de "Je t'aime pareil" :

http://www.mougin.org/iphone/851aad63f2df4487f6cfebe55e4c4360a024395a/mp3/Jet_aimepareil_11375-17.07.2010-ITEMA_20235556-0.mp3

L’émission de cette semaine commence en effet par l’évocation d’Alan TURING, devenu héros national en 1945 dans la Grande-Bretagne de l’après-guerre, puis traité comme un pestiféré sept ans plus tard par une nation puritaine ignoble et ingrate. Je n’y reviens pas : référez vous à tout ce qui précède et au résumé fait par check.

Cette semaine, l'émission propose un parcours dans l’histoire de l’homosexualité.

En apéritif, elle nous offre à nouveau un florilège de stupidités dues à l’ignorance et à la prétention hétérocrates. Amusez vous plutôt que d’en pleurer, parce que c’est aussi bête que c’est méchant !

Parmi les invités figure Alex TAYLOR, journaliste à France-Inter, qui parle de ce qu'a été l'homosexualité en France et en Grande-Bretagne dans les années 80. Il est l'auteur d'un livre très drôle, intitulé Journal d’un apprenti pervers.

Alex quitte la Grande-Bretagne en 1979, époque encore très puritaine et insupportable, à l’arrivée de Mme Thatcher qui introduit la « clause 28 », assez vague, mais qui interdisait la promotion de l’homosexualité dans l’espace public. À son arrivée en France Alex découvre « un phare de liberté », où le Ministre de la Justice de l’époque déclare : « Il est grand temps que ce pays reconnaisse ce qu’il doit aux homosexuels ».

Bel exemple du rapport quasi constant (il y a des exceptions notables toutefois) entre politique de droite et répression de l’homosexualité d’une part et, d’autre part, entre politique de gauche et libéralisme sexuel.
En 1984 , Fréquence Gaie, 24h/24, radio sponsorisée… par le gouvernement français de l’époque qui fit bcp pour les droits de l’Homme et les droits des Gays.

On évoque les premières Gay Prides, au début des années 80, où les participants (qui à l’époque étaient 3.000, alors qu’aujourd’hui ils sont 300.000 !) se faisaient encore cracher dessus, et où les gens étaient abasourdis, ne comprenant pas à quel cataclysme ils étaient en train d’assister !
Aujourd’hui, on ne sent plus la différence entre les participants, majoritairement homo, et les spectateurs hétéros !

Époque de liberté « en France bcp plus qu’ailleurs » qui a aussi correspondu à l’apparition de l’épidémie de sida – on parlait à l’époque du « cancer gay » !–, laquelle a aussi généré des changements de comportements, vers des pratiques plus « soft », où amour, tendresse et désir de stabilité prenaient plus de place.

C'est alors l'hécatombe des victimes du sida, puis création des associations de lutte : AIDES et ActUp.


Intervenant suivant : Marc, 72 ans ! Membre de l’Association des Gais Retraités, d’entraide et d’assistance en région parisienne.

Il parle des « années cachées », de 1950 à 70.

Adolescent à la fin de la 2ème guerre mondiale. Un adolescent ne devenait un homme qu’une fois qu’il avait été déclaré « Bon pour l’armée, bon pour les filles ». Marc découvre son homosexualité. Réaction de sa mère: « Mon chéri ne te tracasse pas. Nous allons te… soigner ! ». À cette époque, le parlement français déclare l’homosexualité « fléau social » (par un amendement qui ne sera abrogé qu’en 1974, sous un gouvernement de droite). Seuls milieux où il était pensable d’être homo : les intellectuels et les artistes. L’ancêtre du mouvement de défense des droits des homosexuels dans ces années-là : Arcadie dissoute en 1982, et qui eut jusqu’à 10.000 adhérents (dont l’auteur de ces lignes !…), fondée en 1954 par André BAUDRY (toujours vivant et coulant une vieillesse qu’on espère heureuse en Italie !), personnage charismatique et créateur du mot « homophile » (pour éviter la connotation trop forte du mot « homosexuel »).

Emblématique de ces années d’après-guerre, et ayant eu à subir la répression homophobe (on n’employait pas ce mot à l’époque): Charles TRENET, l’un des chanteurs les plus populaires que la France ait connus. À cette époque, l’histoire de l’homosexualité se confond avec celle d’une répression parfois féroce.

Plus avant, et en Angleterre, en 1895, condamnation à deux ans de travaux forcés pour homosexualité, du célèbre écrivain et dramaturge Oscar WILDE. Interview de l’auteur d’une pièce sur le procès de WILDE actuellement à l’affiche, Robert BADINTER, qui n’est autre que l’ancien Ministre de la Justice socialiste dont a parlé Alex TAYLOR. « Wilde a été détruit parce qu’il était scandaleux […] Démonstration du processus judiciaire et pénitentiaire par lequel une société détruit un homme qui la brave. »

Cet épisode tragique rappelle qu’il existe encore aujourd’hui des tas de pays qui sont à des moments différents de leur histoire vis-à-vis de l’homosexualité, et qui la traitent encore comme l’Angleterre traita Oscar WILDE il y a plus de cent ans.

Du côté des femmes, Anne RAMBACH, essayiste et scénariste qui a travaillé sur la romancière (et strip-teaseuse de music-hall !) COLETTE, qui a vécu avec une femme, surnommée « Missy », pendant des années de manière affichée pendant les années 20. Écriture remarquable mais livres scandaleux, au point que l’université française a, pendant une cinquantaine d’années, passé sous silence certains titres écrits par elle (par exemple Le Pur et l’Impur, 1935) !

Remarque très intéressante : plus encore que l’homosexualité elle-même, ce qui est intolérable dans ces sociétés, c’est l’idée de remettre en cause la légitimité de la répression. « Aussi longtemps qu’on accepte d’avoir honte, on peut éventuellement être toléré à la marge. Mais le jour où on dit “Non, cette règle est injuste et je vais la combattre”, là ça devient bcp plus frontal et bcp plus violent ».


L’excellent Louis-Georges TIN, fondateur de la Journée Internationale contre l’Homophobie et auteur, notamment, d’un Dictionnaire de l’Homophobie. Il répond à la question, en effet historique : l’homosexualité a-t-elle toujours existé ? Le mot – et non la chose ! – est apparu à la fin du XIXe siècle. L.-G. T. insiste sur la diversité des significations des mots et des gestes relatifs à l’homosexualité selon l’histoire et la géographie.

Il rappelle que le terme de « sodomie », très utilisé au cours des siècles passés, tire son origine de l’épisode biblique de la destruction de Sodome, repris dans le Coran par l’histoire de Loth, et qu’il fait l’objet d’interprétations et de lectures très diverses aussi bien dans le domaine judéo-chrétien que dans le domaine musulman : la condamnation était-elle celle d’une pratique sexuelle ou, comme le pensent aussi de nombreux exégètes, celle d’un manquement à l’hospitalité ? C’est la première interprétation qui, comme nous le savons, a prévalu pour donner lieu, au XIIIe siècle dans le droit chrétien, à une accusation de péché capital pouvant être puni de la peine de mort.

Le mot « pédérastie » appartient au domaine de l’Antiquité grecque, et désigne surtout une relation d’initiation entre une jeune et un adulte, relation très valorisée dans la culture grecque. Il y a dans cette relation de l’affection, de l’érotisme, de l’éducation. Cette tradition est reprise dans le monde romain, avec toutefois l’apparition d’une stigmatisation du comportement efféminé et/ou passif (déjà !) chez les hommes de même âge et de même statut.

Au Moyen-Âge, dans la culture chevaleresque, on assiste à un culte de ce que L.-G. T. appelle l’« homosocialité », c’est à dire la vie entre hommes entre lesquels naissent des affections très fortes, pas nécessairement à dimension sexuelle. Pas de présence des femmes, exclues de la scène publique, et encore moins de l’amour des femmes entre elles. D’ailleurs, dit Anne RAMBACH, comment devenir lesbienne si on n’a même pas la disposition de soi, ni accès à l’idée qu’on pourrait avoir une sexualité autonome ? Et cette question se pose encore aujourd’hui dans des sociétés où le femmes sont cantonnées dans une statut inférieur.

Le coup de fil de l’étranger : la RUSSIE

Au cours des 300 dernières années, l’homosexualité n’a été pénalisée en Russie que depuis une vingtaine d’années. Cela avait commencé au début du XVIIIe siècle avec le tsar Pierre le Grand qui avait commencé à pénaliser l’homosexualité, mais les lois tsaristes sont abrogées en 1917 avec la révolution soviétique. En 1921, le nouveau code pénal promulgué par Lénine ne mentionne pas l’homosexualité. Et c’est Staline qui, en 1934, repénalise l’homosexualité, surtout pour l’utiliser contre les opposants politiques : comme quoi, dictature et homophobie ont toujours fait bon ménage ! De ce point de vue, les islamistes, PJD compris, sont les staliniens du monde arabe d’aujourd’hui ! Beaucoup d’homosexuels ont été envoyés dans les camps du Goulag jusqu’en 1993, le 27 mai exactement, sate à laquelle Eltsine dépénalise à nouveau l’homosexualité, sous la pression de l’étranger pour que la Russie puisse entrer dans le Conseil de l’Europe.

La société russe reste très hostile aux homosexuels, du fait du durcissement observé depuis l’arrivée de Poutine : l’idéologie soviétique s’étant écroulée soudainement en 91-92, le pouvoir politique a besoin de « valeurs » fortes et fait appel à un retour du religieux (c’est à dire le christianisme orthodoxe), dont les positions sont très archaïques et très homophobes, et visent même les lesbiennes.

Autre leçon sur l’alliance entre les politiques et les religieux sur le dos des homosexuels !

Pour que la justice soit respectée, les associations homosexuelles doivent faire appel à l’Union Européenne, dont le soutien est parfois très tiède… du fait de ses intérêts économiques (l’approvisionnement en gaz russe est tout de même plus important que la liberté des homos russes !).


Petite BIBLIOGRAPHIE hebdomadaire :

Louis-Georges TIN
Dictionnaire de l’homophobie, 2003, puf.

Anne RAMBACH
La Culture gaie et lesbienne, Fayard, 2003.

Alex TAYLOR
Journal d'un apprenti pervers, Editions JC Lattès, collection Littérature française.

Frédéric MARTEL
Le rose et le noir, Seuil

Jacques FORTIN
L'homosexualité est-elle soluble dans le conformisme ? Textuel


Semaine prochaine : la Culture, et les différentes façons de gérer son homosexualité. Alors restez à l'écoute !

Et pour la reprise de la biographie d'Alan M. TURING. On était déjà fiers qu'il soit l'inventeur de l'automate programmable avec sa fameuse "machine de Turing", mais désormais, on aura une pensée émue pour lui chaque fois qu'on allumera le Mac et/ou l'iPod/Phone !

Rappelons que, sous la pression d'une pétition rédigée par des scientifiques et des intellectuels britanniques et adressée au gouvernement en 2009, le Premier Ministre britannique de l'époque, Gordon Brown, a présenté des excuses posthumes à Alan TURING.

"Nous soussignés demandons au premier ministre de s'excuser pour les poursuites engagées contre Alan Turing qui ont abouti à sa mort prématurée." Cette courte pétition, qui a récolté plus de dix mille signatures, a été soumise au premier ministre britannique. Au Royaume-Uni, tout citoyen peut lancer une pétition qui, si elle rassemble cinq cents signatures en un an, contraint le gouvernement à y apporter une réponse écrite et détaillée.

Depuis, le scientifique a été réhabilité. Depuis 1966 – un an avant la légalisation totale de l'homosexualité au Royaume-Uni – un "prix Turing", souvent appelé "Nobel de l'informatique", est attribué par l'Association for Computing Machinery. Une statue du mathématicien a été érigée en 2001 à Manchester. Mais pour John Graham-Cumming, l'informaticien britannique qui a lancé la pétition, c'est insuffisant. "Le sort qui a été réservé à Alan Turing est affligeant. Nous avons perdu un grand homme, mort à 41 ans alors qu'il avait probablement beaucoup de grandes choses à accomplir (...). S'il n'était pas mort si jeune, il aurait probablement été fait chevalier", écrit-il sur son blog.

La pétition, qui avait commencé modestement, a reçu le soutien de plusieurs scientifiques, dont le généticien Richard Dawkins, mais aussi de l'auteur Ian McEwan et de plusieurs militants des droits des homosexuels.

Suite (mais pas fin !) de l'histoire posthume d'Alan TURING.

Comme quoi, quand 30.000 personnes se décarcassent pour publier une pétition et réclamer justice, même posthume, cela peut parfois donner des résultats !

LEMONDE.FR avec AFP | 14.09.09 | 10h38 • Mis à jour le 14.09.09 | 10h50

Dans une tribune au Daily Telegraph, le premier ministre britannique Gordon Brown a présenté ses excuses, au nom du gouvernement britannique, pour le traitement "déplorable" réservé au mathématicien Alan Turing dans les années 1950. Turing, l'un des plus brillants scientifiques de l'époque, avait largement contribué au décryptage des codes secrets utilisés par l'armée allemande durant la seconde guerre mondiale. Mais après guerre, la révélation de son homosexualité – qui constituait un délit à l'époque – avait ruiné sa carrière ; après une condamnation en justice pour "indécence", il s'était vu refuser toute participation aux grands projets scientifiques de l'époque. Alan Turing s'est suicidé en 1954, en partie, estiment ses défenseurs, parce qu'il avait été condamné à la castration chimique.

"Bien que Turing ait été traité selon la loi de l'époque et que nous ne puissions pas remonter le temps, ce qu'on lui a fait était bien entendu totalement injuste", écrit Gordon Brown. "Il n'est pas exagéré de dire que, sans sa contribution hors du commun, l'histoire de la seconde guerre mondiale aurait pu être très différente", poursuit-il. Depuis plusieurs mois, une pétition au premier ministre demandait des excuses du gouvernement. Elle a été signée par plus de 30 000 personnes et soutenue par plusieurs personnalités du monde de la culture, des sciences et des militants des droits des homosexuels.

Peter Tatchell, militant du groupe Outrage!, qui lutte contre les discriminations faites aux homosexuels, a salué le geste de Gordon Brown, mais estimé qu'il ne s'agissait que d'un premier pas. "Traiter Turing comme un cas particulier, simplement parce qu'il est célèbre, est injuste", estime-t-il. Environ 100 000 Britanniques ont été condamnés à la castration chimique, estime son association, jusqu'au vote du Sexual Offences Act, en 1967, qui légalisait les rapports sexuels entre hommes. L'homosexualité féminine n'était, quant à elle, pas punie par la loi.

[Infos : www.lemonde.fr]